La gestion de la paternité en entreprise est un sujet qui prend de plus en plus d’importance au sein des entreprises. Il touche à beaucoup de problématiques contemporaines, comme l’égalité femmes / hommes, l’équilibre vie professionnelle / vie personnelle, … Si certaines avancées ont été réalisées ces dernières années, l’accompagnement de la paternité par les entreprises reste encore plus faible en France que dans d’autres pays européens.
Quels sont les dispositifs légaux d’accompagnement de la paternité en entreprise ?
Il en existe plusieurs : le congé de naissance, le congé de paternité, le congé parental d’éducation.
Le congé de naissance
Le congé de naissance dure trois jours et doit être pris à une date proche de la naissance. Il se cumule avec le congé de paternité mais pas avec le congé de maternité. La mère qui donne naissance à l’enfant n’y a donc pas droit.
Le grand avantage de ce congé est d’être considéré comme du temps de travail effectif. Autrement dit, ces trois jours sont traités comme des jours travaillés, et rémunérés comme tels.
L’employeur ne peut en aucun cas refuser ce congé à un salarié.
Le congé paternité
Tous les salariés peuvent bénéficier du congé paternité s’ils deviennent père au cours de leur vie professionnelle, quel que soit le contrat du travail qui les lie à leur employeur (CDI, CDD, contrat temporaire) et quelle que soit leur ancienneté. Le père de l’enfant, quel que soit sa situation familiale, a le droit de bénéficier de ce congé. Peu importe que le couple soit marié, pacsé, vive en concubinage.
D’un point de vue légal, le congé de paternité et d’accueil de l’enfant (l’intitulé entier du congé) dure 11 jours calendaires consécutifs. Autrement dit, un peu moins de deux semaines. Si vous débutez votre congé de paternité un lundi matin, vous l’achèverez le vendredi de la semaine suivante. Si vous le commencez un vendredi matin, il s’achèvera le mardi en huit. En cas de naissances multiples (jumeaux ou plus), cette durée est prolongée pour aller jusqu’à 18 jours.
Ce congé n’est pas fractionnable. Autrement dit, vous devez prendre les 11 jours (ou 18) en une seule fois, sans interruption. Vous pouvez faire démarrer ce congé dès la fin du congé de naissance, ou plus tard, dans un délai de quatre mois à compter de la naissance de l’enfant.
Vous devez prévenir votre employeur a minima un mois avant la date à laquelle vous souhaitez faire démarrer le congé et préciser la date de fin de ce congé. S’il est possible de faire cette demande oralement, préférez une demande écrite et datée, pour formaliser les démarches.
Si votre demande est formulée dans les temps, votre employeur ne peut pas s’y opposer. Il a également l’obligation de vous réintégrer à votre poste ou sur un emploi similaire, avec une rémunération identique ou supérieure.
A la grande différence du congé de naissance, le congé de paternité provoque la suspension du contrat de travail. Autrement dit, le salaire n’est pas maintenu. Vous pouvez percevoir des indemnités journalières de sécurité sociale si vous êtes en arrêt complet d’activité.
Cependant, tout change le 1er juillet prochain ! Le congé paternité sera alors de 25 jours (ou 28 jours pour naissances multiples) calendaires, soit un petit peu moins d’un mois.
Le congé parental d’éducation
Le congé parental d’éducation (CPE) est un congé accessible à tout salarié, homme ou femme, à une seule condition : disposer d’un an d’ancienneté dans l’entreprise à la date de naissance de l’enfant.
Le congé parental d’éducation peut être pris à temps plein comme à temps partiel. Vous pouvez demander à CPE pour ne travailler que 4 jours sur 5 par exemple.
Le CPE a une durée maximale d’un an, mais peut être renouvelé 2 fois, au plus tard jusqu’aux 3 ans de l’enfant. Ces conditions évoluent en fonction du nombre de naissances simultanées (si jumeaux ou plus).
Pour bénéficier de ce congé, vous devez en faire la demande par courrier deux mois avant le début du congé. Toute prolongation ou modification doit être demandée au moins un mois avant la fin initiale du congé. Si votre demande est faite dans les temps, votre employeur ne peut pas s’y opposer.
Tout comme le congé de paternité, le congé parental d’éducation entraine la suspension de votre contrat de travail. Cependant, certains dispositifs vous permettent d’obtenir des allocations de la part de la Caisse d’Allocations Familiales (CAF) sous certaines conditions.
Lorsque votre congé s’achève, votre employeur doit vous réintégrer sur votre emploi, ou sur un emploi équivalent, avec une rémunération au moins équivalente.
Comment les entreprises utilisent-elles ces dispositifs ?
Ce qui est décrit ci-dessus représente le minimum légal auquel a droit tout salarié. Cependant, certaines entreprises décident de proposer des solutions supplémentaires à leurs salariés. Il s’agit d’éléments différenciant qui sont parties prenantes de politique de qualité de vie au travail, d’égalité professionnelle et de marque employeur.
Ainsi, certaines entreprises proposent des congés paternités de plus longue durée, au-delà des 11 jours légaux existants. Elles peuvent aussi proposer un maintien de la rémunération du congé de paternité ou du congé parental d’éducation.
Cependant, de telles mesures ont un coût, aussi toutes les entreprises ne sont pas en mesure de les proposer. On retrouve ce type d’aménagement plus facilement dans les grands groupes du CAC40 que dans des PME au budget plus réduit.
La France est-elle en retard sur ce sujet ?
Les dispositifs légaux d’accompagnement de la paternité en France paraissent moins développés que chez certains de nos voisins européens. Les quatorze jours cumulés du congé de naissance et du congé de paternité font pâle figure face aux dispositifs d’autres pays. Même l’avancée de juillet prochain ne permet pas à la France de rattraper ses voisins.
Ainsi, l’Espagne propose aujourd’hui un congé paternité de 16 semaines à ses salariés, soit la même durée que le congé de maternité ! Ce congé est surtout rémunéré à 100%. De plus, la deuxième partie du congé, après 6 semaines, peut être prise de manière discontinue sur une année complète après la naissance.
Les pays nordiques sont également plus généreux que la France. En Suède, un congé paternité peut durer jusqu’à 420 jours, plus d’un an. La Norvège a choisi un régime mixte de 49 semaines : 10 semaines sont accordées au père, 10 à la mère. Les 29 semaines restantes sont réparties entre les deux parents selon leur choix.
La France n’est cependant pas la mauvaise élève de l’Union Européenne. Ainsi, l’Italie accorde 5 jours de congé paternité, plus une journée que la mère peut céder au père. En Grèce, le congé paternité est de 2 jours.
Et le congé maternité ?
Le congé maternité le plus répandu (pour 1er et 2e enfant) est de 16 semaines maximum : 6 semaines prénatales et 10 semaines postnatales. La moitié de ce congé est obligatoire, dont au moins 6 semaines après l’accouchement. Le congé maternité est donc trois fois plus long que le congé paternité.
Allonger le congé paternité au même niveau que le congé maternité est un réel enjeu d’égalité hommes / femmes, pour deux raisons :
- D’abord, il s’agit de permettre à un homme de passer autant de temps avec son enfant lors de ses premières semaines que ce qui est possible pour une femme.
- Ensuite, cela permettra de réduire les discriminations à l’embauche pour une femme en âge d’avoir des enfants. Ces discriminations existent encore par peur de l’absence prolongée d’une femme en congé maternité. Si les congés maternité et paternité sont de durées équivalentes, il est souhaitable qu’une grande partie de ces discriminations à l’embauche disparaitra.
12 avril 2021 – Robin Labouérie