Ils font partie des mots de plus en plus utilisés lorsque l’on parle de formation professionnelle : l’upskilling et le reskilling. Derrière la course à l’anglicisme, quelle est la traduction concrète de ces deux termes dans les politiques de formation des entreprises ? Et surtout, pourquoi a-t-on le sentiment de les entendre de plus en plus dans l’univers de la formation ?
Comment traduire Upskilling et Reskilling ?
Quelle est la traduction littérale de ces deux anglicismes qui ont envahi les services de formation français ? L’upskilling, du verbe « to upskill », se traduit par « montée en compétences ». Le reskilling, du verbe « to reskill », se traduit par « recevoir une nouvelle formation ». On comprend un peu mieux l’intérêt de l’utilisation des anglicismes : ils permettent d’exprimer en un mot ce que la langue française ne peut dire qu’en une phrase complète.
De manière plus approfondie, l’upskilling consiste à approfondir ses compétences pour s’améliorer dans son métier. Cela peut être l’acquisition d’une nouvelle compétence, devenue nécessaire à l’exercice du métier (la formation à un nouvel outil informatique de gestion comptable par exemple), mais cela peut aussi concerner l’approfondissement d’une compétence déjà acquise mais qui nécessite d’être maitrisée plus en profondeur pour parfaitement remplir les exigences quotidiennes du métier (une formation approfondie à la négociation commerciale par exemple).
A l’inverse, le reskilling consiste en l’acquisition de nouvelles compétences avec pour objectif de changer complètement de métier. On ne vise plus une amélioration des compétences pour occuper le poste actuel mais bien une transformation complète des compétences professionnelles. Cela nécessite un parcours de formation plus fourni, plus détaillé, plus long également. Ainsi, un gestionnaire financier voulant se reconvertir dans les ressources humaines devra se former sur différents items : le droit social, la négociation individuelle et collective, la formation, la rémunération, etc.
Pourquoi autant de succès pour l’Upskilling et le Reskilling ?
On l’a dit, ces deux termes ont le vent en poupe dans les différents services Ressources Humaines et leurs composantes formation. Il y a plusieurs raisons à cela :
1) Il s’agit de la raison d’être de la formation professionnelle
Les services formation n’ont pas attendu la popularité grandissante de ces anglicismes pour exister. Leur vocation depuis des années reste la même : assurer l’employabilité du collaborateur tout au long de sa carrière. Cela fait des dizaines d’années que les entreprises proposent des modules de formation à leurs collaborateurs, pour leur permettre de se perfectionner dans un métier, d’évoluer professionnellement, voire de changer radicalement de métier. Cela correspond exactement aux définitions de l’upskilling et du reskilling énoncées plus haut.
2) L’arrivée des politiques de GPEC dans les entreprises
Malgré cette raison d’être inhérente à l’existence de la formation professionnelle, il y a aujourd’hui un contexte favorable au développement de ces deux concepts. Depuis 2005, toutes les entreprises de plus de 300 salariés ont l’obligation de lancer tous les trois ans une négociation portant sur la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences. Comme pour toute nouveauté, il y a eu des premiers accords d’expérimentation. Aujourd’hui, les entreprises les plus avancées ont signé plusieurs accords GPEC et son désormais rodées au processus.
Elles ont saisi l’opportunité de ces accords pour planifier des transformations en profondeur de leurs compétences et de leurs métiers, en pleine mutation. La vague de ces accords GPEC permet d’implémenter à grande échelle des politiques de reskilling ou d’upskilling dans les entreprises. Par exemple, une entreprise dont les métiers ont été transformés par le digital peut mettre en place à l’échelle de toute l’entreprise un grand programme de reskilling vers ces nouveaux métiers. De la même manière, une entreprise automobile peut implémenter un programme ambitieux d’upskilling pour faire monter en compétences ses salariés autour du véhicule électrique.
3) Les transformations de plus en plus rapides des métiers
Il existe bon nombre de statistiques que l’on nous donne régulièrement : « 85% des métiers de 2030 n’existent pas encore », « Nous changerons tous 3 fois de métiers dans notre carrière », …
Derrière l’avalanche de statistiques plus ou moins précises et fiables : la révolution digitale et la croissance exponentielle des nouvelles technologies provoquent une mutation constante des métiers existants sur le marché de l’emploi. Dans tous les secteurs, de niveau de qualification variés, de nombreux métiers du quotidien n’existaient pas il y a quelques années, ou du moins pas dans ces proportions : Data Scientist, Community Manager, livreurs à vélo Deliveroo ou autres plateformes, etc. Nous ignorions que ces métiers existeraient ou allaient autant se développer en quelques années. De toute évidence, cette tendance risque de se perpétuer, voire de s’accélérer.
Ce contexte de mutation profonde incite les salariés à se former plus régulièrement pour s’adapter aux évolutions du marché et aux nouvelles compétences apparues. Les nouveaux métiers qui fleurissent sont aussi un appel à se reformer en profondeur pour commencer une nouvelle vie professionnelle, plus en accord avec ses valeurs personnelles, ou tout simplement par envie d’un nouveau défi passionnant.
Quand bénéficier d’un programme d’Upskilling ou Reskilling ?
Au long d’une vie professionnelle, il existe des moments charnières, qui sont les meilleurs moments pour demander à bénéficier d’un programme de formation type upskilling ou reskilling, ou pour saisir l’opportunité proposée de participer à un de ces programmes.
Tout d’abord, lorsque vous voyez se mettre en place dans votre entreprise un vaste plan de formation, ambitieux, que ce soit pour du reskilling ou du upskilling. En effet, si votre entreprise met en place ce genre de plan, via un accord GPEC par exemple, c’est qu’une mutation des métiers et des compétences est en cours sur son marché.
C’est une bonne opportunité pour vous interroger sur l’évolution que vous souhaitez donner à votre carrière : soit accompagner la mutation de votre métier, auquel cas bénéficier de programme d’upskilling vous permettra d’être armé et outillé pour aborder cette évolution dans les meilleures conditions possibles ; soit vous estimez que l’évolution de ce métier ne vous correspond pas et / ou que vous préférez un nouveau défi, auquel cas vous pourrez sauter sur l’occasion d’un programme d’upskilling.
Ensuite, si vous voulez évoluer professionnellement, il peut parfois être nécessaire de passer par un programme d’upskilling pour vous donner les meilleures chances de vous voir proposer l’opportunité dont vous rêvez. De la même manière, vous arriverez peut-être à un moment où vous sentirez être arrivé au bout de l’intérêt que vous portez à votre métier, où vous aurez l’envie de bifurquer vers une autre voie professionnelle. Dans ce cas, ce sera à vous de vous renseigner au sein de votre entreprise, ou en dehors, pour bâtir un plan de reskilling en accord avec vos aspirations.
Robin Labouérie